Crise de la Coquille, Tome II
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Communiqué Prefecture Caen 24/11
http://www.sante.gouv.fr/
http://dgs-urgent.sante.gouv.fr/
Noix et corail en toute confiance NFM vers.4
Carte zones interdites semaine 53

Préambule :
Permettrez moi de rappeler quelques principes de base et faire aussi certaines mises au point. Toutes les coquilles que vous trouvez sur vos étals ne présentent strictement aucun risque. Vous pouvez donc en consommer sans modération ! Les gisements, dont les coquilles sont légèrement contaminées, sont fermés. A contrario, les noix fraiches d'Ecosse, que vous trouvez un peu partout, proviennent toujours de gisement contaminés puisque toutes les côtes écossaises sont touchées par la toxine. Eh oui...personne nous vous l'avez dit ! Décortiquées, la poche noire enlevée, ces produits sont parfaitement consommable puisque la toxine ne touche pas le muscle, heureusement !
La crise de la coquille c'est donc :
 - Une crise sanitaire : certes, mais très minime puisque les gisements concernés sont tous fermés et les taux de toxines (acide domoïque) juste au dessus de la norme (OMS) admissible de 20 µg/g de chair totale. Suite au problème de la vache folle, du sang contaminé, des poulets a la dioxine, ..., un protocole européen encadre le traitement de ces crises sanitaires. L'affaire est donc suivi de très prêt et je peux vous assurer que la santé publique prime avant tout autre impératif. A suivre ici :
http://www.sante.gouv.fr/ et sur http://dgs-urgent.sante.gouv.fr/
Vous y trouverez une information précise et des liens jugés "innoportuns" en début de crise. Certains pensent toujours que moins ont en dit mieux on se porte. C'est vrai qu'entre une info scientifique mal comprise et un journaliste qui veut faire dans le sensationnel, pas facile de choisir !
- Une crise médiatique : avec une actualité à rebondissement, l'approche des fêtes, l'image produit haut de gamme de la csj, l'engouement depuis 4 ans pour les coquilles fraiches entières, la coquille fait les gros titres de la presse et la une à la Télé. Certains font dans le sensationnel quitte à écrire des anneries. C'est bien dommage car à terme le consommateur risque de perdre confiance et se détourner du produit. Il manque encore aujourd'hui une communication claire de la filière peche. En l'absence d'outil dédié, il n'est pas facile de parler d'une même voix. NFM, qui communique depuis longtemps sur les atouts de la csj, se retrouvent donc en charge maintenant de garder intact le capital sympathie du consommateur. Sacré challenge auquel elle s'attelle avec l'aide de la Région et des Départements !
- Une crise économique pour les professionnels pêcheurs et mareyeurs. Les français peuvent se passer de coquille. Mais les ports et la filière ne se passeront des pecheurs ! La coquille, espèce n°1 en Basse Normandie, représentant 70 % du CA en moyenne de la flotille cotière. Si le problème s'installe et persiste, c'est un drame pour toute une flotille qui ne pourra se recentrer sur d'autres espèces. Reste le solution du décorticage, mais il faut mettre en place des moyens matériels et surtout trouver un marché pour ces noix fraiches. Avec un prix moyen à la production qui, dans ce cas de figure, posera problème aux armements pour équilibrer leurs comptes.
Pseudo-nitzchia nous a volé notre ouverture :
L'ouverture de Baie de Seine, c'est toujours en grand moment, une fête, un peu d'anxiété pour la météo, la fébrilité et l'inquiétude de savoir si les belles seront présentes, un départ en fanfarre, un retour bruyant, des mines réjouies. La Baie de Seine c'est le ballon d'oxygene du coquillard, sa cerise sur le gateau, le point d'orgue de fin d'année, bref c'est Noël, du bon, que du bon, du bon stress !
Cette année tout faux, ça n'ouvre qu'à moitié, sans espoir de voir le reste enfin épargné par cette saloperie. Avec aussi cette mauvaise nouvelle tombée en fin de semaine, qui n'a fait qu'accentuer le désespoir des marins, la rade de Brest est également touchée par la toxine.
Autant vous le dire de suite mes amis, c'est pas la grande forme, j'ai pas le moral. Les dernières analyses et conclusions en Préfecture du 24/11 ont permis d'ouvrir une partie de la Baie de Seine. Assis à côté d'un scientifique compétent et sympathique, je lui ai demandé son intime conviction sur l'évolution probable du phénomène. Cette joie hâtive non dissimulée de certains à pouvoir annoncer une bonne nouvelle, ces paroles trop faciles : le bloom est passé, on est sur une régression..." ne m'avaient pas convaincu. L'homme, tout de noir vêtu, m'a fait part de son doute à pouvoir confirmer que la bataille était gagnée. Je l'ai cru. J'ai senti dans son regard l'incertitude de celui qui ne sait pas et qui a l'honnêteté de ne pas le cacher.
J'en concluais donc dans ma dernière chronique du 24/11 : "Mais rien n'est gagné, la nature peut encore nous réserver des surprises."
Nous voilà donc repartis pour un suivi quasi journalier de la crise de l'ASP qui devient nationale avec nos compagnons d'infortune bretons.
BREST, 4 déc 2004 (AFP)
La pêche à la coquille Saint-Jacques interdite à Camaret
La pêche à la coquille Saint-Jacques est interdite jusqu'à nouvel ordre dans le gisement de Camaret (Finistère) en raison de la présence d'une algue toxique microscopique, a-t-on appris samedi auprès de la Direction des Affaires maritimes. Des analyses ont révélé une contamination par la toxine ASP produite par l'algue microscopique Pseudo-nitzchia. "Dans le cas présent, la concentration entraînerait plutôt des troubles digestifs dans les 48 heures", précise la Direction des Affaires maritimes dans un communiqué. La pêche à la coquille Saint-Jacques est interdite, pour les mêmes raisons, dans la rade de Brest depuis le 1er décembre. Les analyses ont révélé que la contamination de la rade était générale, mais les autres coquillages, praires, pétoncles, moules, et les huîtres ne sont pas contaminés. Par ailleurs, les analyses n'ont pas révélé de contamination en baie de Morlaix. Une cellule de suivi a été mise en place à la préfecture du Finistère.
Billet d'humeur :
La semaine dernière je m'étais insurgé, comme beaucoup de professionnels, contre le déplacement de la cellule de suivi en sous-préfecture du Havre. Cela n'a parait-il pas plu. 
Et oui, il y a toujours quelques fâcheux pour faire un curieux amalgame entre finemaree.com et nfm.fr. Je les rassure, j'ai encore la tête sur les épaules et je sais très bien me débrouiller entre ma casquette de patron-pêcheur et celle de président du groupement. A ces esprits chagrins, je rappelle volontiers que la lecture de finemaree n'est en rien obligatoire et qu'ils peuvent se contenter des communiqués de la préfecture ou des mes apparitions télévisuelles....
Et puis, j'ai un truc en plus, un truc dont tout le monde ne peut pas se vanter, pas un truc qui fait crack boom uuuuuuuhhhh comme Dutronc, un truc qui me donne autorité et légitimité pour m'exprimer, un truc dont tous les messieurs en costume gris et cravate banale ne peuvent se réclamer, un truc qui fit kiffer Aristote en 380 avant JC, un truc qui me met de plein fouet dans cette crise, un truc qui fait de cette crise un problème viscérale, un truc unique qui fait rever tout le commun des mortels, un truc qui devrait inspirer, à certains, un peu de respect, un truc en voie de disparition, et oui, je suis un marin, un marin-pêcheur. 
Et vous n'aurez pas, non vous n'aurez pas, pas ma liberté d'expression...;-), comme dit le chanteur d'opérette de Patagonie.
L'ouverture de Baie de Seine le 29/11/2004 :
Nous nous sommes tous retrouvés dans l'Ouest du 0°47' W à 2 Mn dans NW de la Tonne de Cussy, tous les bas-normands, sans oublier tous les hauts normands, maloins et autres boulonois ! Avec des bateaux toujours plus gros et toujours en plus grand nombre sur une Baie réduite à un mouchoir de poche. On a donc tapé dedans, sans grande conviction. Ventes catastrophiques puisque toute la csj est partie au prix plancher soit environ 2.40 €. Avec des retraits massifs, un bon tiers des marchandise n'ont pas trouvé preneur ! Une catastrophe à demi prévue, malgré la durée de peche réduite à 7 h pendant les 4 marées hebdomadaires.
Oui, il y a trop de bateaux dans la Baie de Seine, oui malgré la diminution du contingent bas normand l'effort de peche n'a en rien diminué puisque les bateaux sont de plus en plus gros, Oui les hauts normands n'ont jamais réduit leur contingent, oui il faudrait une gestion commune des licences, oui nous n'avons même pas la liste des licenciés de la Haute Normandie. Oui un certain nombre de bateaux présents sont suspectés de ne pas avoir de licence. Oui après l'annonce du maintien de la fermeture partielle de la Baie, beaucoup de bas normand avaient de l'amertune à voir les rendements diminuer en fin de semaine et tous ces bateaux hors régions qui repartiront chez eux dès que le gisements sera mis à blanc, sans laisser aux riverains, privés de csj tout le mois de novembre, de quoi finir l'hiver. Oui, c'est un problème, qui pourra aller au large en janvier ou fevrier ou s'expatrier sur Dieppe pour travailler 1 jours sur 4 ? Oui, tout cela est encore "tabou".
La Baie de Seine est un gisement classé, mais malgré une réglementation qui s'affine d'années en années, la pression de peche est loin de diminuer. Témoin le reliquat tres faible de csj de la saison 2003 présent sur les fonds. A l'image de toutes les pêches européennes, on pêche toujours trop et trop petit et toutes les réglementations en place n'ont pas grand effet sur la ressource. Reste que c'est mieux que rien et que les esprits progressent. La réglementation du gisement est très bien perçue par les profesionnels.

Malgré le mauvais temps de la 1ère journée, le quota fut atteint rapidement avec 300 kg à l'heure, les rendements prévus par Ifremer étaient au rendez-vous. Les 2 et 3émes journées furent plus faciles avec du beau temps. La dernière fatiguante, 20/25 Nds de NE et des rendements en forte dimminution. Nous n'avons pas fait ce sacro-saint quota. Nous avons noté sur zone la présence du Thémis des Affmars. Au cours des semaines à venir la surveillance des zones fermées devrait se montrer plus active. C'est impératif.

En début de crise, un administrateur me disait : "vos collègues, ils n'ont pas tout compris". C'est certainement vrai. Mais je pourrais aussi retourner cette litote aux services de l'Etat.
Autant  la crise sanitaire a été traitée avec réactivité et vigueur, autant le traitement des problèmes sociaux, la communication auprès des professionnels, la communication grand public, les moyens matériel et financier de l'Etat pour le suivi sanitaire, la mise en place d'un dispositif de type "calamimités agricoles", se font attendre. Pour exemple sur les problèmes de com, un scribouillard du Parisien qui raconte n'importe quoi en annonçant des morts en Ecosse il y a 4 ans, d'autres une penurie de coquille pour les fetes et l'information tourne au délire.
Si le 10 novembre, j'avais été un peu incisif avec M. le Directeur du Cabinet du préfet concernant l'idée de mettre en place à bord de chaque bateau une balise de positionnement, c'est surtout parce que je ne voulais pas que la détention de ce matériel soit un préalabre à la ré-ouverture de peche. Mais maintenant, je crois qu'il faudrait très sérieusement rendre obligatoire l'installation de ce matériel et prévoir comme pour les bateaux de + de 15 m un financement par les collectivités.
Pour finir une bonne nouvelle, une enquete consommateur commandité par l'Ofimer montre que peu de consommateurs sont informés sur la toxine. Un peu de mauvais temps, un peu moins d'apport, de la com, voilà le coktail gagnant pour que la csj se revende.
Après 3 semaines d'ouverture, le 15/12/2004 :

La Baie ou plutot le secteur 1 (voir carte) est "gratté". Les coquilles se font rares et même si le temps a été rallongé, ça tire. Côté marché, cela s'arrange avec l'approche des Fetes. Mercredi, bonne nouvelle, le secteur 3 sera ouvert dès dimanche. Un nouveau ballon d'oxygène pour la flotille et le marché de Noel. Reste que du gros mauvais temps est prévu :-((

Ouverture de toute la Baie de Seine, le 22/12/2004 :
Toute la Baie de Seine est ouverte. Je ne crois pas au Pere Noel, mais là c'est vraiement un beau et inspéré cadeau ! Carte ici